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« Going Infinite », de Michael Lewis : Sam Bankman-Fried, le mauvais génie des cryptos

« Going Infinite. FTX, l’ascension et la chute du magnat des cryptomonnaies » (Going Infinite. The Rise and Fall of a New Tycoon), de Michael Lewis, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Grégory Berge, Talent Editions, 324 p., 21.90 €, numérique 14 €.
Si l’empire financier que vous dirigez est sur le point de s’écrouler, Michael Lewis est à la fois la pire et la meilleure personne à avoir à vos côtés. La pire, parce que l’auteur du Casse du siècle (Sonatine, 2010) est un ­expert dans l’art du détail assassin et un excellent connaisseur des petites et grandes arnaques du monde de la finance. La meilleure, parce que le journaliste américain a un faible pour les antihéros et les visionnaires coupables d’avoir eu raison avant tout le monde.
Le problème, c’est que Sam Bankman-Fried, dit « SBF », que Michael Lewis, pour écrire son nouveau livre, Going Infinite, a suivi pendant plusieurs mois avant la chute spectaculaire de son entreprise de cryptomonnaies, FTX, n’est ni l’un ni l’autre. Certes, par moments, l’auteur prend fait et cause pour son sujet, notamment dans une conclusion un peu étrange laissant entendre que « SBF » a été trop vite condamné par le tribunal de l’opinion publique. Mais sans parvenir à masquer le caractère foncièrement détestable de l’ancien PDG de FTX.
Le Bankman-Fried qu’il décrit n’est pas particulièrement brillant. Certes, c’est un mathématicien doué pour les probabilités, mais ses talents semblent s’arrêter là. Gestionnaire catastrophique, patron injuste, « SBF » apparaît dominé par un seul sentiment : l’indifférence envers à peu près tout. Le récit est émaillé de situations dans lesquelles il dit une chose et fait l’inverse, et assène pour toute ­réponse à ses interlocuteurs un « ouaip » qui, dans sa bouche, peut aussi bien vouloir dire « oui » que « non ».
L’entourage qu’il a rassemblé pour gérer FTX et son fonds d’investissement jumelé, Alameda, n’inspire guère plus de sympathie à la lecture. A la tête de l’empire FTX se trouvaient une poignée de jeunes cadres choisis moins pour leurs compétences que pour leur foi dans l’« altruisme efficace », une philosophie, inspirée par le penseur australien Peter Singer, consistant à maximiser le bien que l’on peut faire – par exemple, en gagnant énormément d’argent pour l’investir dans des causes à fort impact. « SBF » voyait deux grands dangers : l’intelligence artificielle (IA) et les pandémies. Un an avant la chute de FTX, il avait distribué 1 million de dollars à cent experts en santé et en IA, avec pour seule instruction de les dépenser de manière « efficace ».
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